Sommaire
- L’architecture organique de Rudolf Steiner
- Isabelle VAL DE FLOR, architecte
- Réalisations de projets d’architecture organique en France et dans le monde
- voir la carte de localisation
Edito
En 2011, partout dans le monde, on célèbre le 150ème anniversaire de la naissance de Rudolf Steiner (1861-1925).
Son œuvre unique, qui couvre presque tous les domaines de la vie, apparaît encore aujourd’hui comme celle d’un pionnier : les germes de renouveau qu’il a implantés il y a un siècle dans notre civilisation commencent à peine à éclore et s’avèrent porteurs d’espoir sur la terre entière.
Rudolf Steiner a innové dans le domaine de l’éducation (des milliers d’écoles et de jardins d’enfants Waldorf dans le monde), la médecine et les médicaments (Weleda), l’agriculture (méthode biodynamique), l’économie (banques éthiques), il a inspiré des peintres comme Mondrian, Kandinsky ou Beuys, créé des formes de mobilier inhabituelles, et imaginé un style de constructions qui anticipait l’architecture organique du 21ème siècle.
Une grande rétrospective (« Cosmos Rudolf Steiner ») a été présentée à l’automne 2010 au Kunstmuseum de Wolfsburg, puis au printemps 2011 au Kunstmuseum de Stuttgart. On pourra encore la voir de septembre 2011 à mars 2012 au Vitra Design Museum près de Bâle.
À cette occasion, le monde artistique, en même temps que le grand public, ont découvert avec surprise l’importance des impulsions novatrices de Steiner pour notre époque. Au cours des dernières décennies, diverses expositions avaient déjà été organisées ici et là (notamment par Harald Szeemann) avec quelques-uns des dessins si frappants que Steiner a fait lors des milliers de conférences et de cours qu’il donna à travers l’Europe ; mais c’est la première fois qu’une exposition de cette envergure est organisée pour mettre en valeur le « généraliste » Steiner.
Ses idées vont à l’encontre de beaucoup d’intérêts dominants.
S’il a été très admiré par certains, il a aussi été beaucoup attaqué. Aujourd’hui encore, son nom n’est connu que d’un petit nombre. Lui qui voulait d’abord être compris et incitait ses auditeurs et ses collaborateurs à penser par eux-mêmes et à se libérer de tout système idéologique aura été dévotement cité, ou violemment discrédité, ce qui veut dire, dans les deux cas, dédaigné.
Pourquoi Rudolf Steiner, malgré l’ampleur et l’intérêt fondamental de ses travaux, reste-t-il aussi méconnu, 150 ans après sa naissance ?
C’est peut-être simplement parce qu’il était tout sauf un spécialiste.
Or à notre époque tout personnage important ne peut être qu’un spécialiste.
Lorsque Kandisky commença à écrire des poèmes et des œuvres dramatiques, il savait qu’il se discréditerait en tant que peintre ! Le Corbusier fut un grand architecte, Einstein un grand physicien, Gandhi un grand politique. Mais un homme qui travailla dans tellement de directions peut-il être autre chose qu’un dilettante ?
Or c’est justement sa mobilité, sa transdisciplinarité, l’universalité de sa pensée qui font le génie de Steiner. Il a su s’entourer de savants, de pédagogues, de médecins, d’agriculteurs, d’artistes, de théologiens, d’économistes, qu’il a aidés à sortir du matérialisme étroit et à saisir le spirituel de façon lucide et féconde.
Beaucoup trouvent ses livres trop difficiles, voire carrément illisibles. C’est que ceux-ci font appel à de toutes nouvelles pensées. Mais une pensée qui paraît « facile » est une pensée que l’on connaît déjà, que l’on a pensé des milliers de fois.
Or Steiner crée de nouvelles pensées, qu’il faut commencer par créer soi-même, par un effort personnel.
L’œuvre de Steiner prouve que les solutions pour avancer vers un avenir où l’homme et la nature se réconcilient existent.
Elles impliquent d’élargir notre compréhension du monde matériel jusqu’à saisir aussi, par la pensée scientifique, la dimension spirituelle du monde.
Raymond BURLOTTE